"Par suite d'encombrement, votre appel ne peut aboutir…"
Le téléphone portable est un outil merveilleux…
quand il marche. Or, en RDC, les réseaux de communication mobile
causent beaucoup de désagréments. Les abonnés en sont réduits à avoir
plusieurs opérateurs, parfois plusieurs téléphones, pour avoir une
chance de pouvoir appeler ou d'être joints. Reportage à Bukavu, à l'est
du pays.
"Je suis obligé
de porter sur moi quatre téléphones pour ne pas manquer les appels de
mes correspondants qui sont abonnés à différents services de téléphonie
mobile", se plaint Étienne Musikami, qui tient une quincaillerie à
Bukavu, à l’est de la République démocratique du Congo. En RDC, le
portable est devenu un outil dont des millions de personnes ne peuvent
plus se passer au quotidien, comme le rappelle Pacifique Deba, un
étudiant : " Le téléphone permet de vaincre les distances, de traiter
avec des intermédiaires et de s’informer entre amis, frères, collègues
et connaissances. Il suffit d'avoir un appel urgent à passer quand vous
n’avez plus d’unités pour être perturbé toute la journée." Grâce au
mobile, les commerçants peuvent continuer leurs affaires sans être
présents dans leur magasin. "Les deux employés qui travaillent dans ma
boutique m’appellent pour me consulter en cas de discussion sur le prix
d’un article à vendre ou à payer", ajoute Jules Luchali, un commerçant
qui s’approvisionne en Ouganda.
Mais lorsque le portable ne marche plus ou mal, la vie devient
compliquée et les affaires tournent mal. C'est le cas à Bukavu. Quand
on appelle un correspondant, on entend des messages divers : "Votre
appel est en train d’être transféré", "Le poste de votre correspondant
est soit éteint, soit hors périmètre cellulaire", etc. Parfois, en
pleine conversation, la communication est coupée et quand vous
rappelez, un répondeur automatique vous dit que le numéro composé
n’existe pas.
Lignes encombrées
Interrogés, des responsables de sociétés de télécommunications
expliquent que les lignes sont encombrées... "Personne ne peut se
confier à un seul réseau, tous accusant des insuffisances à tout
moment", confie, sous anonymat, un chargé de gestion des abonnements
d'une de ces sociétés. De fait, de nombreux clients, pour ne pas
risquer de rater un correspondant, achètent les puces de différents
réseaux de téléphonie et les installent sur leur mobile dans l'espoir
que l'une d'elles leur permettra de téléphoner. D'autres achètent
plusieurs appareils.
Beaucoup à Bukavu se plaignent de la mauvaise qualité du service rendu,
surtout lors des nombreuses périodes de tarifs promotionnels. "Comme la
plupart des gens veulent appeler à un tarif réduit, il devient
impossible d’atteindre un correspondant", constate H. Chirhakarhula,
administrateur d’une Ong. "Je recharge 100 unités pour communiquer
librement durant une journée, comme l'assure la publicité, mais le
répondeur répète que par suite d’encombrement, mon appel ne peut
aboutir", se plaint Odilon Cibanvunya, un étudiant, abonné à cinq
réseaux différents ! "Nous passons parfois toute une journée sans
passer d’appels ni en recevoir", ajoute Vedaste Mwikiza, un étudiant
stagiaire au bureau de la Société civile.
Beaucoup de publicité pour des services médiocres
Les affaires en pâtissent. Les gens sont prêts à tout pour téléphoner
et les sociétés de téléphonie en profitent pour vanter leur réseau,
forcément le meilleur : "Super cell, la connexion supérieure", "Avec
CCT, payer moins et parler plus" ; "Zain, un monde merveilleux" ; "Rien
ne vous rapproche comme Vodacom", etc., etc. Ceux qui veulent encore y
croire affluent et s'abonnent… à leurs risques.
Pour essayer de compenser le tort causé ainsi à leurs clients, ces
sociétés mènent diverses actions de promotion. "Nous réduisons le tarif
durant les heures creuses et le week-end pour alléger la tâche des
abonnés et, plusieurs fois par an, nous accordons des bonus aux
meilleurs clients", annonce, souriant, le chargé de clientèle d'un des
opérateurs de Bukavu. "Chaque année, ajoute-t-il, nous organisons aussi
un concours avec différents prix pour les gagnants." "Publicité,
extension du réseau loin dans les villages, promotion et concours… ne
servent à rien tant que les abonnés actuels sont mal servis", estime
Anaclet Ndochi, un manager. Les gens souhaiteraient plutôt que de
nouvelles lignes soient ouvertes pour désengorger le réseau actuel,
d'autant qu'ils ne peuvent pas compter sur le téléphone fixe qui
n'existe pas entre Bukavu et les autres villes.
Source : Agence syfia