un Député MLC arrêté au Rwanda est reconnu Rwandais par un tribunal rwandais
Le MLC pourrait perdre par invalidation l’un de ses Députés, Dunia
Bakarani, un Tutsi élu Député du territoire de Masisi (Nord-Kivu) lors
des dernières Législatives. Poursuivi par une banque rwandaise dans une
affaire d’abus de confiance, mis aux arrêts, l’homme a invoqué son
statut de Député national r-dcongolais jouissant de ce fait de
l’immunité parlementaire. Mais un tribunal de Gisenyi l’en a débouté le
reconnaissant comme rwandais. «Au minimum, un homme disposant de la
double nationalité». Et a ordonné les poursuites contre Bakarani et sa
mise en dépôt.
Déjà trois audiences dans ce
procès ont eu lieu. La troisième était prévue mardi 22 septembre. Elle
devait porter sur des questions de procédure de détention. A l’audience
du 17 septembre devant le tribunal de base de Gisenyi, le ministère
public a déclaré poursuivre Dunia Bakarani pour «abus de confiance» et
«détournement des fonds appartenant à l’Access Bank», une banque privée
rwandaise.
L’ARME FATALE POUR EXTRAIRE DUNIA DES GRIFFES DE SES JUGES.
Le député Dunia Bakarani avait été arrêté le 5 septembre par la police
de Rubavu à Gisenyi. Access Bank l’accuse d’avoir contracté par fraude
un crédit d’un montant en Frw d’une valeur de 100.000 dollars US, en
complicité avec le gérant de cette banque - un Rwandais - qui se trouve
également aux arrêts.
Me Buhuru, l’avocat conseil de Dunia Bakarani, a fait une exception en
évoquant la qualité de l’accusé qui jouit d’une immunité en tant que
Député en fonction. Il a exigé sa mise en liberté pure et simple.
Selon Me Buhuru, son client doit bénéficier du privilège d’immunité et
cela en sa qualité de député étranger en fonction pour être exempté de
toutes poursuites sur le territoire rwandais. Réponse du berger à la
bergère. Oscar Badiga, magistrat du ministère public, a répliqué en
invoquant l’article 6 du code pénal rwandais qui autorise les
juridictions rwandaises de poursuivre toute personne (r-dcongolaise ou
autre) qui commet une infraction sur le territoire rwandais, exceptés
les représentants du corps diplomatique en fonction ou en mission au
Rwanda.
Le ministère public a précisé qu’en l’espèce, Dunia Bakarani ne se
trouvait pas en mission officielle au Rwanda, et qu’aux faits qui lui
sont reprochés s’ajoute l’infraction de séjour irrégulier sur le
territoire rwandais. Étant donné que l’intéressé n’a présenté ni
passeport diplomatique ni un autre document des services d’immigration
qui atteste son entrée régulière sur le sol rwandais.
Acculé dans ses derniers retranchements - et pour ne pas aggraver le
cas de son client qui se serait trouvé en situation irrégulière sur le
territoire rwandais sans disposer des papiers nécessaires -, l’avocat
de Dunia Bakarani a sorti l’arme fatale pour tenter d’extraire Dunia
Bakarani des griffes de la justice rwandaise: son client jouirait de la
double nationalité.
En clair, si le Député national MLC est rwandais, il est en même temps
Citoyen de R-dC. Et l’avocat a expliqué que la Constitution rwandaise
admet la double nationalité. L’avocat a donc admis que son client est
citoyen rwandais puisqu’ayant la nationalité rwandaise. De ce fait, il
n’est pas obligé de présenter un document quelconque pour justifier son
séjour dans son propre pays. Selon Me Buhuru, Dunia Bakarani est entré
au Rwanda comme citoyen rwandais et non comme citoyen r-dcongolais.
DES RWANDO-R-DCONGOLAIS EN FUITE A KINSHASA.
Décision du président du tribunal de base de Gisenyi, le juge Félicien
Rutaremare, qui s’esr reporté à l’article 6 du code pénal rwandais: «Le
tribunal accepte le statut de double nationalité de Dunia Bakarani
conformément à la constitution du Rwanda. Le tribunal accepte que Dunia
se trouve au Rwanda comme citoyen rwandais, ayant domicile et résidence
au Rwanda et non comme député congolais en séjour au Rwanda. Et ordonne
qu’il soit poursuivi en tant que tel ayant commis une infraction sur le
territoire rwandais».
Pour bien des juristes, l’exception de privilège d’immunité soulevée
par Me Buhuru ne se justifie pas. On rappelle que dans l’affaire
Access, une vingtaine de personnes, toutes rwando-r-dcongolaises, ont
été arrêtées malgré qu’elles ont remboursé des fonds perçus. Selon des
sources proches du parquet près le tribunal de base de Gisenyi,
certaines personnalités impliquées dans cette affaire sont sur le
territoire r-dcongolais.
On parle avec insistance du cas de l’épouse d’un homme d’affaires
r-dcongolais influent à Goma au Nord-Kivu. Aux dernières nouvelles, il
l’aurait envoyée à Kinshasa pour la soustraire des poursuites de la
justice rwandaise. Il reste dans cette affaire des questions d’ordre
politique bien embarrassantes pour le Mouvement de Libération du Congo.
Comment ce parti politique avait-il pu accepter en son sein un étranger
ou, à tout le moins, quelqu’un disposant d’une double nationalité?
Comment l’avait-il présenté comme candidat à une élection à laquelle ne
pouvaient prendre part que des R-dCongolais?
La question pourrait tout aussi s’adresser à la Commission Electorale
Indépendante, CÉI. Elle qui avait organisé les opérations d’enrôlement,
de même que les scrutins?
Joint mercredi 23 septembre, le rapporteur général de la CÉI, Dieudonné
Mirimo explique au «Soft International» que les conditions, aux termes
de la Constitution, pour qu’une personne soit enrôlée est qu’elle
présente à l’agent commis à l’enrôlement l’une des pièces ci-après: un
certificat de nationalité, un passeport en cours de validité, la carte
d’identité des années MPR-parti État, une carte de service.
VERS L’INVALIDATION DU DÉPUTÉ MLC.
«Mais la CÉI a fait mieux: elle a affiché les listes d’enrôlement pour
un contrôle social et nous n’avons pas souvenance que quelqu’un ait
dénoncé qui que ce soit dans la circonscription électorale de Masisi.
Peut-être avait-on peur...».
Il poursuit: «Nous supposons que des cas Dunia Bakarani sont nombreux.
Au Parlement d’agir...». Il rappelle comment des cartes d’identité -
les fameuses couleurs vertes des années Mobutu - furent falsifiées,
surtout dans les Kivu.
Il est vrai que la question de la double nationalité des parlementaires
r-dcongolais avait été fort débattue au tout début de la Législature en
cours et un moratoire avait été accordé. Depuis, on en sait pas plus...
L’affaire de Gisenyi repose avec acuité cette question et pourrait
conduire à l’invalidation du Député MLC... Elle embarrasse le MLC qui,
à ce jour, a reconnu le fait que l’un de ses Députés était arrêté et
poursuivi au Rwanda dans une affaire de droit commun.
source : le soft international