Tragique attaque de Makila contre Kamerhe
L’auteur de la motion sur la double nationalité la fait rebondir,
reprochant publiquement l’ex-speaker d’avoir étouffé son initiative
dans l’œuf et fait de l’Assemblée nationale une chambre de règlements
des comptes
Fini le temps où José Makila, le gouverneur déchu de l’Equateur en
procès contre le procureur général de la République et le procureur
général près la Cour d’appel de Mbandaka devant la Cour suprême de
justice, était restreint à la réserve. Après le verdict de la CSJ,
Makila a retrouvé son droit à la parole et fait une mémorable sortie
devant les médias samedi 26 septembre 2009 au Maquis de GB. L’ex-gouv’
a tiré sur tous sauf sur son petit frère et mentor, Jean-Pierre Bemba
Gombo. D’abord sur la justice dont il ne conteste pas la décision le
déchargeant de ses fonctions mais qu’il accuse de partialité et de
négligence dans le traitement des dossiers. Ensuite sur l’ex-speaker de
l’Assemblée nationale Vital Kamerhe, son propre beau-frère qu’il rend
coupable d’avoir gelé sa motion contre les acteurs politiques
RD-congolais détenteurs de double nationalité et d’avoir fait de la
chambre basse du Parlement une chambre des règlements de comptes.
Makila est convaincu qu’en poussant la plénière des députés à statuer
sur la prétendue affaire de détournement de 85 millions de FC dans
laquelle son nom était abusivement cité «alors que l’argent avait servi
dans le cadre de l’opération retour en faveur du gouvernement central»,
Kamerhe avait visé sa défenestration de l’Exécutif provincial. Entre
les deux, c’est désormais la passe d’armes. Enfin du MLC qui ne l’a pas
soutenu pendant son tourment, il exige un pardon public.
N’allez pas demander à José Makila le sentiment qu’il éprouve envers
Vital Kamerhe dont il a épousé l’une des sœurs. Makila garde une dent
contre son beau-frère. L’inimitié entre ces deux parents, deux figures
de la scène politique RD-congolaise, l’un ayant évolué dans l’ombre de
Jean-Pierre Bemba et l’autre Kabiliste même s’il est encore donné en
disgrâce avec son maître, tous deux anciens ministres dans le
gouvernement 1+4, est quasi certaine. Pour sa première sortie
médiatique après les arrêts n° RAA 087 et 088 rendus publics le 21
septembre le déchargeant de ses fonctions de gouverneur élu de
l’Equateur, Makila a choisi d’attaquer Kamerhe en public. L’opinion a
eu à s’en rendre compte à la faveur de son coup de gueule devant une
cinquantaine des journalistes conviés à son point de presse de samedi
26 septembre. A la base de cette passe d’armes, l’influence de Kamerhe
dans la décision de la plénière de l’Assemblée nationale de déférer
Makila devant un juge pour la «soi-disant affaire de détournement de 85
millions de FC destinés à la paie des enseignants du District
d’Ubangi». Makila se souvient encore de cette plénière qui a, entre
autres, précipité sa chute alors que le rapport sur lequel elle s’est
fondée avant de statuer est aujourd’hui contredit par la Commission
rogatoire du Parquet général de la République dépêchée à Gemena. Il
affirme qu’à ce jour, le doute ne subsiste plus sur le fait que cet
argent a servi dans le cadre de l’opération retour en faveur de deux ou
trois ministres du gouvernement central. Makila ne pardonne pas à
Kamerhe d’avoir privilégié le débat sur ce dossier alors qu’il en a
gelé d’autres, en l’occurrence sa sulfureuse motion sur la double
nationalité. Un cas patent est sorti des rangs mêmes du MLC, le parti
dont est issu Makila. Dunia Bakarani, député MLC élu de Masisi, a été
appréhendé et détenu à Gisenyi où le juge Félicien Rutaremare l’a
reconnu citoyen rwandais en vertu de l’article 6 du code pénal
rwandais. Makila le sait mais il n’en a cure. Son souci est que ce
dossier explosif soit débattu. «Ma motion a été noyautée par Kamerhe
qui avait fait de l’Assemblée nationale une chambre des règlements de
comptes et rendu un mauvais service à la nation», accuse Makila.
Le MLC effarouché à son tour
Le gouv’ sortant de l’Equateur prend même du plaisir à saluer
l’éviction de Kamerhe du perchoir. Trop grave pour ne pas susciter la
réaction de l’auditoire. A la remarque que Kamerhe est un beau-frère
qui ne peut pas subir pareille remontrance publique, Makila rétorque
sans mettre des gants: «nous sommes en politique!». Tragique.
Impitoyable, cette politique. Nul ne sait jusqu’où ira la querelle
entre les deux parents mais Makila, lui, promet d’ester en justice
contre l’Assemblée nationale dont il proteste l’initiative et surtout
le jugement. Il se réjouit du reste de cette démission qui lui permet
de mieux remplir sa mission d’élu du peuple et de dénoncer le moindre
dérapage. «La politique rime avec la mort et la prison. Moi, je n’ai
pas peur de ces deux éléments», désillusionne-t-il d’avance. Comme pour
se défier, Makila entend peser de tout son poids pour que le dossier
double nationalité soit enfin débattu à l’Assemblée nationale. Il se
targue d’ores et déjà de son poids politique, son score aux
législatives nationales, 117.000 voix, le deuxième après Moïse Katumbi
-120.000 voix. Il dit qu’à lui seul, il peut mobiliser en faveur de la
révision de la Constitution et donc d’autres importantes décisions
comme la prochaine élection de son successeur. Même s’il ne s’oppose
nullement aux arrêts de la CSJ qui confirment son départ du gouvernorat
provincial de l’Equateur, Makila fait un retour sur la scène politique
avec ses déclarations tonitruantes. Fini le temps où le désormais
ex-gouv’ de l’Equateur en procès contre le procureur général de la
République et le procureur général près la Cour d’appel de Mbandaka,
était restreint à la réserve. Il accuse dorénavant la justice d’avoir
été instrumentalisée ou orientée. Il fait état des «manœuvres sordides
et dilatoires boutiquées par des esprits malins et mesquins afin de
conduire les instances judiciaires» à le déchoir. Ses indices: la
décision de la plénière de l’Assemblée nationale, la motion de défiance
de l’Assemblée provinciale de l’Equateur; initiée dans la précipitation
totale et n’ayant respectée la procédure judiciaire en la matière dans
ce sens que la sanction avait précédé le contrôle ou l’enquête
parlementaire; l’interdiction fin avril 2009 de son retour à Mbandaka
alors que la Cour d’appel de cette ville l’avait lavé. Dans le même
registre, Makila fait figurer le message radio n°
030/D.023/16.155/17.200/PGR/SEC/2009 via lequel le PGR instruisait le
procureur général près la Cour d’appel de Mbandaka d’interjeter
urgemment appel contre l’arrêt de la Cour d’appel de Mbandaka le
réhabilitant… et les déclarations publiques d’un «haut cadre de l’ANR
selon lesquelles le président de la République avait déjà mis la croix
sur son éventuel retour à l’Equateur en tant que gouverneur». Entré en
quasi rébellion, Makila ne ménage personne. Il effarouche même le MLC!
Hormis Jean-Pierre Bemba, l’unique cadre du MLC dont il affirme avoir
bénéficié du soutien, Makila se plaint d’avoir été abandonné par les
siens. Il reproche au MLC de ne l’avoir pas soutenu activement et exige
de sa part un pardon public. De cette indulgence pourraient dépendre
son comportement et ses futurs rapports avec le parti.
Source : Africanews