Parmi l'un des grands défis à relever dans cet élan de la refondation de l'Etat congolais, il y a bien sûr la restructuration des Forces armées de la République démocratique du Congo, FARDC. Au regard de l' évolution de la situation sur tous les fronts de la vie nationale, la réforme de l'armée devient une exigence prioritaire. Pour preuve, l'Assemblée nationale a invité le ministre de la Défense à dégager les grandes lignes de cette réforme. C'est maintenant ou jamais le moment de battre le fer. Mieux, il s'agit d'une question de volonté politique de doter réellement la RDC d'une armée nationale, républicaine, dissuasive et performante.

Après avoir déposé jeudi 1er octobre devant l' Assemblée nationale le projet de loi portant réforme des FARDC, Charles Mwando Nsimba, ministre de la Défense et des Anciens combattants a été invité par les députés nationaux, à donner des plus amples précisions sur cette réforme. Une réforme qui, selon lui, doit s'étaler sur une durée de dix ans et axée sur le recrutement, la formation, l'équipement et la mise en retraite honorable.

La question étant d'une importance capitale pour autant qu'elle relève des attributs de l'indépendance de tout pays, on doit s'attendre à un débat fort intéressant. En fait, ce n'est pas la première fois que la réforme des FARDC a été évoquée. Plusieurs recettes ont été essayées et ont donné les résultats que tout le monde connaît. C'est-à-dire, des résultats qui ne satisfassent pas encore le peuple congolais tant il est vrai qu'il reste beaucoup à faire.

Certes, les FARDC sont en train de suivre deux lièvres à la fois en cette pleine restructuration. D'un côté, préserver l' intégrité du territoire national face aux agressions multiples extérieures, et de l' autre, subir les différentes phases de la réintégration des forces armées congolaises. Dans un contexte d'un pays post-conflit où la priorité politique supplante certains préalables de la mise en place d'une armée classique redoutable et redoutée, les efforts se diluent comme dans un banc de sable. A telle enseigne qu'aujourd'hui, la question est celle de savoir si réellement il existe une volonté politique de doter la République démocratique du Congo d'une armée requinquée, dissuasive et en tant que socle des institutions républicaines ( ?)

UNE APPROCHE REALISTE, UNE VISION NATIONALE

Une réforme de l'armée, sous quelle approche ? Quelle armée pour la République démocratique du Congo ? C'est maintenant ou jamais le moment idéal de répondre à ces deux interrogations et exprimer clairement les réponses au sein des institutions nationales. L'implication des principaux animateurs de ces institutions et les représentants de la Société civile apporterait des éléments nouveaux à cette réflexion.

Il est à retenir qu'on ne peut bâtir une " armée " à partir des groupes armés issus des rébellions. C'est une illusion. La grande réflexion consiste donc à dégager les stratégies essentielles pour s'appuyer sur une approche réaliste qui aboutirait à un travail de qualité.

Certes, une décision de sélection a été prise pour imposer un contrôle médical au sein de l'armée. Il a été constaté une recrudescence de maladies dues à des infections VIH et à des attaques cardio-vasculaires. Il y a là déjà " un nettoyage en douceur " pour se débarrasser des éléments inaptes.

Mais il faut prendre son courage entre les mains et aller au fond du problème. D'aucuns parleraient d'une retour à la case départ avec des hommes de qualité, aptes encore sous les drapeaux, loin de tout choix sélectif sur fond des considérations politiques. L'armée étant un corps apolitique, il y a lieu d'éviter de l'inféoder. Le recrutement doit donc être sévère.

Au fait, cette approche est tributaire d'une vision nationale de ce que c'est une armée. C'est-à-dire, le socle des institutions républicaines. En d'autres termes, un Etat ne peut jamais exister s'il ne dispose pas d'une armée à même de sauvegarder la souveraineté nationale, de protéger les biens et les personnes et de préserver l' intégrité territoriale qui demeurent incontestablement les attributs de l' indépendance de toute nation. Donc, il faut avant tout une réelle volonté politique pour aller droit au but.

Il va sans dire que la mobilisation des ressources sera quantifiée, la réalisation des travaux exécutée selon un programme bien établi, l'acquisition des équipements performants s'obtiendra suivant un chronogramme tandis que le personnel qualifié sera à la place qu' il faut. Outre la logistique, les conditions de travail et de vie du soldat retiendront l'attention des autorités. La discipline étant la " mère de l' armée ", elle s'imposera facilement à tous les éléments de ce corps.

LA MAIN TENDUE DES PARTENAIRES

Une approche bien définie, une vision nationale sans ambiguité, il est désormais possible d'apprécier la disponibilité des partenaires extérieurs de manière à bénéficier de leurs expertises militaires. Il est un fait que l'armée au Congo a une histoire ; depuis l'époque coloniale jusqu' à ces jours, en passant par le règne de Mobutu et les différentes rébellions.

C'est dire qu'à une certaine époque de l'existence de notre pays, il a été tenté plusieurs réformes de l'armée. Ont-elles abouti ? Si oui, qu'a-t-on fait exactement ? Dans l'hypothèse d'une réponse négative, pourquoi ces armées se sont-elles désintégrées ( ?)

L'Afrique des armées a aussi une série d'histoires. Qu'est-ce que les armées africaines ont apporté dans cet élan de l'édification d'une Nation et de la consolidation d'un Etat ? Dans ce cas d'espèce, il a été souvent reproché aux armées africaines d'avoir une couleur régionale ou tribale. Cet aspect du problème mérite une réflexion profonde dans l'intérêt supérieur de la Nation.

Car au moment où des partenaires extérieurs, allusion faite à la Belgique, à la France, aux Etats - Unis… pour ne citer que ces trois ont clairement exprimé leur disponibilité, il importe d'accompagner cet élan pour disposer d'une armée homogène et non hétérogène. Une armée à l' abri des influences tant internes qu' externes et qui aura été mise en place selon la volonté des autorités congolaises qui ont reçu mandat de refonder l' Etat congolais. C'est le prix à payer pour que cette réforme de l'armée soit une réussite.

Source : le Potentiel